On en parlait dans les commentaires de ce billet: quand on compare les ebooks aux livres classiques, on met en avant le confort de lecture, la solidité, etc. et même le côté écolo (pas de piles, pas de plastique,…) des livres imprimés face aux malheureux ebooks, qui n’ont que des défauts.
Je suis un amoureux des livres. Non seulement j’aime lire ce qu’ils contiennent, mais j’aime aussi l’objet — feuilleter les pages d’un livre suffit à me donner le sourire. Mais j’ai un peu le sentiment que dans le duel ebook/livre imprimé, on fait référence à un livre fantasmé, un livre idéal qui n’existe pas ou qui n’existe plus depuis longtemps. Un livre dont on aurait oublié qu’il est devenu un produit de consommation.
Et comme la plupart des produits de consommation — hors chez ces éditeurs fiers de leur métier et amoureux du beau travail — les livres sont avant tout des produits jetables. Le fait qu’on les lise ou pas n’a aucune importance. Tout ce qui compte c’est d’arriver à nous les vendre, avec la meilleure marge de profit. Toutes les astuces sont donc bonnes pour en réduire le coût de fabrication, y compris baisser la qualité du papier et de la reliure (on a non seulement remplacé les cahiers cousus, si solides et souples à la fois, par des dos collés qui cassent, mais on a même commencé à rogner sur la qualité de la colle).
Comment s’étonner alors de se retrouver avec des objets fabriqués sans le moindre souci de qualité ou de… durée :
C’est un livre de 600 et quelques pages, publié par Hachette que j’ai acheté la semaine dernière, neuf. J’ai commencé à le lire il y a deux jours. J’en suis à la page 60, il tombe déjà en ruine.
A 11€, ça fait cher le livre jetable…
(…) je ne vois pas grand monde émerger, au hasard des conversations, des ruines de cette civilisation dont la langue même est en train de mourir pour la seconde fois faute d’être plus largement enseignée. Imaginez qu’un dernier être pensant ait fini d’oublier Rome: alors non seulement Rome aura cessé d’exister, mais elle n’aura jamais existé. Les temps sont proches où l’arc de Septime Sévère, la colonne Trajane, le Colisée n’en diront pas plus aux générations d’alors que les alignements de Carnac ou les statues de l’île de Pâques.”
(Lucien Jerphagnon, Histoire de la Rome antique, Pluriel, p14)
A la place de l’auteur, je m’interrogerais aussi sur la capacité à durer d’une société dont la culture n’est qu’un produit jetable.

Je vous laisse: malgré le livre, c’est un texte très intéressant à lire 😉


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